Michel Hilaire

Exposition au Musée Fabre de Montpellier, 1993

Entrons petit à petit dans le monde d'Isaac Celnikier : cortèges désarticulés d'êtres sans nom qui gardent les yeux grands ouverts jusqu'aux portes de la nuit ; carnets de "choses vues" insoutenables, systématiques : Les otages de Bialystok, Le retour des torturés, Arrivée à Stuthof, Arrivée à Birkenau, Arrivée à Sachsenhausen, jour de sélection, L'abîme... thrène lancinant que l'on ne confondra jamais tout à fait avec les autres convulsions de l'Histoire et du Temps : Invasions, Crimes, Massacres, Révolutions, Terreurs. Comme Callot, Goya, Delacroix, Picasso, Celnikier se sert de son art comme un recours suprême contre l'Injustice et l'Oubli. La réalité transfigurée par la peinture devient Mémoire absolue.

Puis vient le moment de l'apaisement, la passion du monde sensible, l'exaltation, la joie : portraits féminins Anne, Judith, Claire, Gladys, Patricia au matiérisme baroque et coloré à mi-chemin entre Vignon et Rembrandt ; paysages d'Israël ou du midi de la France - orogénie puissante où la terre rejoint enfin le ciel...

Michel Hilaire, né en 1958, est un historien de l'art et conservateur du patrimoine français. Après des études à l'Université Paris IV, il a réussi le concours de conservateur des musées de France en 1984 et a dirigé le musée Fabre de Montpellier à partir de 1992. Il est nommé conservateur en chef du Patrimoine en 2000 et est membre de l'Académie des beaux-arts et officier de l'ordre des Arts et des Lettres.